Bien que passe le temps, elle attend qu’il revienne
Et se languit de lui. Le feuillage a jauni
Sur le micocoulier depuis qu’il est parti ;
L’arbre semble anémié… La douloureuse antienne
D’une chanson d’amour lui taraude le cœur :
Celle qu’il lui chantait pour la faire sourire.
Il faudrait l’oublier, mais son âme soupire,
Même si par pudeur elle feint la froideur.
L’arbre est un peu penché, vrillé par la vieillesse.
Novembre le dévêt de son feuillage roux,
Le laissant désarmé face à l’âpre courroux
Du mistral qui s’en fout… Brisée par la détresse,
Elle attend que revienne avant un morne hiver
Celui qui est parti quand était encor belle
La campagne alentour, et dont la ritournelle
Fleurissait le jardin toujours jaspé de vert.
Parfois le vent faiblit, et il lui semble entendre
Le chant de son amant tout au bout du chemin.
Mais c’est une illusion. Pas un seul être humain
Qui songe encor à elle ! Elle ne sait qu’attendre
L’homme au rire sonnant et aux belles chansons
Qui savait oublier combien elle était vieille.
Comme l’arbre tordu, ou la vétuste treille
Fermement agrippée aux murs de sa maison…
Il ne reviendra plus. Il fait froid, c’est l’automne,
Et l’arbre est dépouillé de son feuillage noir.
Elle clôt ses volets pour ne plus l’entrevoir,
Comme le ciel souillé de mouchetures jaunes…