Marseille, serais-tu ce que tu es, ma belle,
Si je n’existais pas ? Indomptable et rebelle,
Serais-tu devenue ce joyeux trublion
Fallacieusement taxé de rébellion ?
Si je n’étais pas là à battre ton rivage,
Si un groupe de Grecs, lors d’un fort long voyage,
Ne s’était engagé jusqu’au fond de ton port,*
Régnerais-tu ici ! Sans doute que ton sort
Eût été différent. Oui, nous sommes liées ;
Malgré nos dissensions aussitôt oubliées,
Nous ne pouvons vraiment vivre séparément,
Même si nos rapports sont quelquefois déments :
Je te hurle dessus, te heurte, te bouscule,
Le mistral m’assistant afin que tu bascules,
Mais tu résistes bien à nos coups de butoir,
A la montée de l’eau jusque sur tes trottoirs
Tout pétillants d’écume. Et tu as l’arrogance
De fort bien résister à notre extravagance,
De rester endurci face à tous nos assauts.
Marseille mon féal, c’est vrai que tu me vaux…