L’aube est tellement grise et le ciel si blafard
Que nous sommes inquiets. Sommes-nous en Provence ?
Où sont ces couleurs drues marquées par cette outrance
Coutumière chez nous ? De grands pans de brouillard
Flottent sur le jardin en s’agrippant aux branches
Osseuses et tordues des arbres encor nus.
Le mistral n’est plus guère qu’un souffle ténu,
Comme si ce temps mou sous ce ciel gris qui flanche
Avait anéanti sa vigoureuse ardeur.
Je déteste vraiment cette triste grisaille !
J’aimerais mieux la pluie, préférant sa mitraille
Habituelle ici à la morne torpeur
Qui a tout envahi jusqu’au cœur du village.
Mais pourquoi ce brouillard ? Sommes-nous au printemps,
En automne, en hiver ? Et pourquoi donc le temps
Dépose-t-il sur tout cet inquiétant nuage
Déformant chaque chose en gommant ses contours ?
Oh oui, décidément, ce printemps est bizarre
Bien qu’hélas ! de nos jours il ne soit plus si rare
D’assister stupéfait à ce curieux parcours
Des saisons disjonctant de plus en plus souvent.
Comme pour tout, c’est vrai, rien n’est plus comme avant...