Le ciel a déposé sur le pic de Morgon
Un voile arachnéen qui le nimbe d’un roux
Rutilant au soleil. Et le temps est si doux
Qu’on ne croirait jamais que l’automne bougon
Attend depuis un mois qu’on lui rende sa place
Dans le fil des saisons. Pourtant novembre est là,
Qui roussit les prairies depuis un mois déjà!
Mais le beau temps persiste, obstiné, et il lasse
Pas mal les montagnards, car il est aberrant
Que les mélèzes fauve aient encor leurs épines,
Que la montagne affiche une excellente mine,
Bien que le triste hiver soit déjà sur les rangs.
C’est vrai qu’on s’extasie sur l’éclat admirable
Des pentes colorées par le bel or cuivré
Des arbres qui flamboient. Mais l’on est effaré
Par ce temps estival en tous points incroyable.
Car l’on voudrait que l’ordre des quatre saisons
Garde comme autrefois son immuabilité.
Il règne en ce moment trop d »irréalité,
A croire que le Temps a perdu la raison…