Le monstre des grands fonds

La Terre est perturbée. Même sous l’eau profonde,
Tout change peu à peu. Cette partie du monde
Qu’on croyait préservée lentement se transforme ;
Rien n’y est plus pareil, il n’y a plus de normes…

Marseille est agitée. Comme à son habitude,
Rien qui suggère ici la moindre lassitude :
Elle s’agite et court, se démène et rugit ;
Elle n’est que raffut, branle-bas et… conflits.

Pas bien loin du Vieux-port, sans qu’on y prenne garde
Et sans qu’un seul moment la ville trop bavarde
Soit capable d’entendre un râle surhumain,
A jailli des flots noirs une sorte de main :

Plutôt un tentacule, gigantesque et immonde,
Comme on n’en vit jamais, non ! jamais en ce monde,
Suivi d’un corps oblong aussi grand qu’un bateau.
D’autres bras ont suivi, gigantesques poteaux :

Un immense calmar, plus grand que dix baleines,
Qui s’est hissé dehors avec la plus grand’peine :
Un monstre agonisant et qui a écrasé
Un îlot de maisons sous son poids insensé.

Hurlants, épouvantés par l’innommable Bête,
Les Marseillais présents ont tous perdu la tête :
Ne se souciant plus du tout de la circulation,
Ils se sont ensauvés. Une population

De milliers de gens galopant dans la ville,
Talonnés par la peur, poussés par une vile
Terreur chacun-pour-soi ! Et un tohu-bohu
Tel que jamais personne encor n’en avait vu.

Mais la Bête affaiblie s’est vite écroulée, morte,
Après pas mal de casse. Et l’on a fait en sorte
Que son corps monstrueux soit réduit en morceaux
Pour oublier les faits. Gigantesque monceau

De chair sanguinolente. Et misérable bête
Dérangée par un monde ayant perdu la tête !
Pauvre géant des mers lui aussi perturbé
Par trop de changements dans l’abysse ignoré…

A propos Vette de Fonclare

Professeur de lettres retraitée, a créé un site de poèmes dits "classiques", pratiquement tous voués à la Provence.
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