Il souffle ce matin un tout petit vent gris
Agitant méchamment les feuilles assoiffées
Des fleurs de la terrasse. Il les a décoiffées
En les brinquebalant. Un petit vent aigri
Et mal intentionné, qui ne songe qu’au mal.
Virevoltant, dansant, il fait moultes bêtises,
Comme poudrer l’allée d’une poussière grise,
Notre linge étendu s’en trouvant vraiment mal !
Il rôde maintenant près du micocoulier
Encor bien rafraîchi par son épais feuillage.
Portant toujours fort beau, il ne fait pas son âge
Et ombre le mazet depuis un siècle entier.
Mais le vent n’en a cure et n’a aucun respect
Pour le vieillard chenu. Il lutine ses feuilles
Fatiguées par l’été ; sournoisement il cueille
Les plus fragilisées sur le vieux tronc rapé.
Malveillant et cruel, il les fait tournoyer
Sans aucune pitié et il les déchiquette,
En faisant des lambeaux loqueteux qui volettent
Tout autour du jardin. Le premier envoyé
De la male saison, c’est ce petit vent gris
Soufflant pour repousser l’été et sa lumière,
Comme un vieux loup déchu, au fond de sa tanière.
Un petit vent frisquet, un petit vent aigri
D’avoir dû décamper dès les premiers beaux jours.
Il est le messager du tout nouvel automne
Qui ternit peu à peu le Sud d’une ombre jaune…
Contre le fil du Temps, il n’est point de recours !