Posé au bord du monde, un village, là-haut,
S’est accroché au ciel encombré de nuages
Pour ne pas basculer ; et des vapeurs d’orage
L’auréolent en bleu d’électriques faisceaux.
La rue est très pentue ; plutôt un escalier
Qu’emprunte quelquefois un vieillard solitaire.
C’est un village nu aux confins de la terre,
Un hameau esseulé qui semble délié
De toute vie entour. Parfois un long éclair
L’effleure en grésillant d’un tourbillon de foudre.
Flotte alors dans les airs comme une odeur de poudre
Ou d’ozone pourrie. Au loin, le ciel est clair
Sur la montagne bleue auréolée de blanc.
Monde trop isolé tout enveloppé d’ombre,
Seul le village est noir sous les nuages sombres :
On dirait que les nues stoppées dans leur élan
Ont été bloquées net par ses sinistres murs.
Bâti sur un piton presqu’ignoré des hommes,
Il est seul sous la pluie qui fouette et qui gomme
Ses contours indécis d’un long rideau obscur.