A cet endroit stérile où le mur de parpaings
Est soudé au bitume infécond du chemin,
Une plante a poussé, brindille bien calée,
Coincée entre goudron et asphalte pelée ;
Une maigre plantule, un petit rien du tout,
Mais décidée à vivre et à tenir le coup
Malgré sa position pourtant inconfortable.
Tout hérissée de vie, costaude comme un câble,
Elle est bien accrochée et s’appuie sur le mur
De la vieille maison. Il est tout à fait sûr
Qu’elle restera là tant qu’un geste imbécile
Ne la cueillera point. Est-ce une fleur gracile
Ou un arbre futur qui commence à pousser ?
Son frêle pédoncule est raide et hérissé
De piquants aussi drus qu’épines d’aubépine ;
Et malgré son grand jeûne,elle croît et s’obstine
A ne pas dépérir. Oh, si quelqu’un savait
Que c’est un gland coincé entre mur et pavé
Qui est tout juste éclos ! Si l’on n’y prend point garde,
L’herbe de rien du tout, la ramille bâtarde,
Pourrait faire un beau jour grand tort à la maison
En la déracinant contre toute raison…
Le minuscule chêne et sa vie entêtée
S’accrochent mordicus à la pierre effritée.