Marseille est muselé par un masque-épouvante
Qui recouvre les traits des pauvres Marseillais.
L’on ne voit que leurs yeux. L’impression éprouvante
De ne plus être rien et de devoir cacher
Leur visage rieur les rend tout aussi tristes
Et tout aussi sérieux que ces gens de là-haut
Qui ont l’air si posé. Une loi rigoriste
Les force à obéir car la terrible Faux
Pourrait éliminer les gens les plus fragiles.
La ville n’est plus elle, et devenus muets,
Ses sujets transformés depuis peu en vigiles
Sont pour le moins inquiets. Marseillais aux aguets
Intolérants envers ceux qui n’ont pas de masque ;
Frondeurs écervelés et désobéissants ;
Petits enfants soucieux qui voudraient qu’on démasque
Le visage soudain inconnu des parents :
Tout le monde aujourd’hui a l’air vraiment étrange
Avec sur le museau cet affreux voile bleu.
Marseille n’est plus lui, car ce masque dérange
Son vieux fond insoumis s’estompant peu à peu…