La mer est aujourd’hui d’un gris terne et boueux.
Elle est calme, elle est molle, elle semble assagie,
Mais elle l’est bien trop. Et le Vieux Port bourbeux
Aux bateaux endormis n’est plus qu’un lac sans vie.
Oh, que Marseille est triste avec la Mort qui rôde
Dans ses rues désertées d’autos et de passants !
Seuls quelques gens pressés, mais dont la peur érode
Le regard affolé, marchent en se pressant
Pour échapper plus vite à l’infime ennemi
Qui pourrait dévorer leurs poumons si fragiles.
Où donc est le printemps, ce rassurant ami
S’en revenant toujours planer sur notre ville
Quand mars a refleuri ? Tout n’est plus que silence
Car on est confinés au cœur de nos maisons
Sans en pouvoir sortir. Une torpeur immense
A tout annihilé. C’est votre déraison,
Marseillais inconscients, qui a été l’agent
De cette presque mort ! Les bulles de salive
Expectorées partout par vos rires bruyants
Empêchent aujourd’hui que notre ville vive
Alors qu’il suffisait que vous soyez plus sages,
Que vous vous soumettiez, enfin ! pour une fois…
Des masques, du recul ! Et non point cette rage
De toujours s’insurger et d’enfreindre la loi…
Ah ! Encor neuf cents morts, dit-on à la radio.
La peur envahit tout car la ville se vide.
Marseillais inconscients, dont le verbe est si haut,
Vous êtes silencieux ; mais le virus avide
De boire votre vie pourrait bien vous entendre !
L’on dirait que la mer est saupoudrée de cendres…