Mais combien de printemps me reste-t-il à vivre?
Cinq doigts sur chaque main, si le Ciel le veut bien ?
Ma vie ? Derrière moi ! Et je ne comprends rien
A son sprint effréné. Parfois je me sens ivre
De rage, de stupeur, de l’immense regret
D’avoir perdu mon temps sans prévoir que sa fuite
Vers le bout du chemin galoperait si vite.
Ce merveilleux printemps serait-il le dernier ?
Ces cerisiers en fleurs d’où les pétales pleuvent
Comme des flocons blancs, je ne les verrais plus ?
Je ne frémirais plus sous l’agréable flux
D’un vent doux palpitant avec ses ailes neuves,
Pas encor déchaîné comme l’est le mistral ?
Plus que quelques printemps, des lambeaux d’existence
Que le temps en courant emporte dans la danse
Qui me fait tournoyer pour ce funeste bal.
Les printemps quant à eux reviennent chaque année,
Toujours aussi nouveaux alors que je vieillis.
Je n’en ai plus beaucoup à vivre et vous le dis :
Dès le premier soupir, la vie est condamnée
A filer et brûler, météore dans l’air ;
Mais on ne le comprend que quand elle est finie.
Profitez, chers amis, des quelques décennies
Qui vous sont accordées, brèves comme l’éclair !