Il ne pleut pas, il pleure ! Et Marseille est bien triste
Sous son bonnet mouillé de nuées poivre et sel.
Il bruine sur la mer qu’un sombre coloriste
A peint couleur de l’eau qui s’égoutte du ciel.
La grand’ville du Sud n’est pas habituée
A ce rideau brumeux qui voile l’horizon ;
Car prête à tout pour lui, c’est en prostituée
Qu’elle aime son soleil jusqu’à la déraison
Tant il semble sensible à sa rude misère.
La pluie la défigure en faisant ressortir
La hideur de ses murs, que des tags éphémères
Tentent de décorer ! Mais lui sait revêtir
Ses vieux quartiers pouilleux d’une blanche lumière
Dissimulant ses plaies… Maintenant ils sont gris,
Et même le Vieux Port a un aspect austère
Sous ce crachin fangeux et mou qui contrarie
Les touristes venus visiter la Provence.
Il y pleut sans arrêt depuis un mois entier,
Et tous les Marseillais maudissent la malchance
Qui a fait de leur ville un immense bourbier.
Il faut bien concéder que le printemps galège,
Se prenant tout à coup pour un quasi-hiver.
Mais soudain tout se tait : il ne pleut plus, il neige !
Marseille a-t-il donc fait incursion en enfer ?