La Méditerranée, étrangement brumeuse
Et bizarrement calme, oscille doucement.
Elle est voilée de gris par de longs filaments
De brume qui ondoie sur ses eaux écumeuses.
Elle joue au yoyo. Trois cents petites sphères,
Montant et descendant tout comme des bouchons,
Avancent lentement sous un ciel pâlichon
Qui, fort heureusement, n’aggrave pas l’affaire
Car le soleil ténu a un peu tamisé
Ses rayons trop brutaux. Tous ces ballons avancent
Vers la côte, au lointain, et la mer qui balance
Refrène ses excès pour ne point trop user
Leur cran désespéré. Trois cents boules d’ébène
Tentent de parvenir à une île, là-bas,
Soit au sommet des flots, soit tirées vers le bas !
Oubliées la rancoeur, et la peur, et la haine :
Il faut nager, nager… Quelquefois un ballon
Ne réapparaît plus, car vivre l’exténue.
Boules noires crépues, les autres continuent…
Dans le lointain brumeux, sur l’horizon tout blond,
Une barcasse en feu termine son naufrage.
Berceau d’un beau passé maintenant renié,
Lassée d’être aujourd’hui un immense charnier,
La mer soutient au mieux ces pauvres gens qui nagent…