Poème illustré par un tableau de :
Vincent Van Gogh
(1853-1890)
Sur la cime d’un if un oiseau insomniaque
Roucoule à coeur perdu sous la lune d’été.
Le ciel est bleu-marine, et la boule emplumée
Chante sa solitude. Il reste quelques flaques
De la pluie déversée par un presqu’ouragan
Sur le jardin broyé. La saison est trop chaude,
L’été trop destructeur ; et le chagrin taraude
Le minuscule oiseau criaillant son tourment
D’avoir perdu son nid au coeur de la tempête.
Il est tout seul là-haut au sommet de son if,
Les regrets tailladant son petit coeur à vif ;
Et ses trilles blessés n’ont plus ni queue ni tête.
Quelques bribes de paille et de piètres fétus
Sur l’allée du jardin : c’est tout ce qui lui reste
De son havre pouilleux, son abri si modeste ;
Et sans son propre gîte il sait qu’il est perdu !
L’oiseau privé de tout semble si malheureux
Que la lune excédée voudrait bien l’éconduire.
Ce chuchotement gris, c’est l’oiseau qui soupire
Au sommet de son if sous l’astre pâle et bleu.