Poème illustré par un tableau de :
Marc Chagall
(1887-1985)
Le Grand Saint-Jean* est vide, et Marc s’y sent très seul.
Il y a du brouillard sur le vieux cimetière
Où il vient de porter un bouquet de glaïeuls.
Son cœur serré est lourd de questions, de prières :
Où sont donc désormais les âmes envolées
De ceux qui ne sont plus ? Où sont-ils donc partis,
Ces très chers en-allés ? Créatures ailées
Qu’on se représentait quand on était petits
Avec une auréole et des ailes au dos ?
Ou, plus mystiquement, psychés immatérielles
Flottant dans un Ailleurs dont l’énorme fardeau
Pèserait lourdement sur leur âme immortelle ?
N’en reste-t-il plus rien ? Mais après tout, qu’importe !
Peu importe qu’ils soient là-bas ou n’importe où ;
Qu’ils aient franchi un jour une incroyable porte
Qui leur ouvre l’accès à un monde plus doux.
L’important c’est d’aimer, de les aimer encor ;
De sentir dans nos coeurs l’immuable présence
De leur amour pour nous ; d’admettre que leur corps
N’était qu’un frêle écrin de bien peu d’importance
Et qu’ils sont toujours là, presque à notre portée ;
Qu’il n’y a que la Vie, qu’il n’y a point de Mort,
Et que toutes les joies qu’ils nous ont apportées
Sont là, au fond de nous, et encor et encor…
Ils ne disparaîtront que quand ils n’auront plus
Personne pour penser à ce que fut leur vie.
A moins qu’ils n’aient rejoint un monde pour Elus ?
Bienheureux ceux qui croient en l’infinie survie…
*Un cimetière d’Aix en Provence