Je fais les soirs d’orage un rêve très étrange
Qui chambarde ma nuit et m’impressionne tant
Qu’il me faut quelquefois un grand laps de temps
Pour renaître à la vie. Un rêve qui dérange
L’ordre bien établi d’une existence sage.
Plus rien n’existe plus et tout est chahuté ;
Je ne reconnais plus les lieux où je vivais,
Il n’en reste plus rien, pas une seule image ;
La Provence n’est plus, ou n’est plus qu’un désert,
Un Sahara aride aux vallées désolées
Où pointent ça et là de tristes mausolées ;
Un monde sombre et sec où la raison se perd.
Il n’y a plus personne et la vie est ailleurs.
Seuls quelques grands oiseaux dont les becs gris cisaillent
Des squelettes dressés tels des épouvantails
Fondent parfois des nues. Une faible lueur
Pose sur les rochers une lumière noire
Qui accentue encor la tristesse du jour ;
Un monde ravagé et fini pour toujours
Où ne subsiste plus qu’un morne désespoir.