Douceur d’un ciel pluvieux qui lentement s’égoutte
Sur la pelouse ocrée par la fin de l’été.
La fontaine moussue s’écoule goutte à goutte
Et crache du lichen aux filaments ouatés.
Le jardin délaissé n’est plus bien arrosé.
C’est un clos enchanté : les roses y sont bleues,
Les pivoines d’argent, le plumbago rosé…
Quatre colimaçons vont à la queue-leu-leu
Tout au long d’une allée qui se perd dans la brume
Où flottent des lueurs. Sous le micocoulier,
Un zeste de soleil miraculé allume
Des étincelles d’or sur le vieil escalier
Descendant vers l’étang où nagent trois canards.
Le ciel gris délavé pleure une pluie bleutée
Un peu ébouriffée par un vent pleurnichard
Qui se traîne en geignant. Les formes sont floutées,
Mais l’on peut, si l’on veut, voir soudain une fée
Au détour du brouillard, juste née d’une fleur.
Son sommeil sibyllin l’a toute décoiffée
Dans son gîte assombri qu’atteste sa pâleur.
Le jardin maladif recouvre sa vigueur
Sous l’averse qui croît et qui tintinnabule.
Mais y subsiste encor un soupçon de langueur
Que les gouttes nacrées dissolvent de leurs bulles.