Poème illustré par un tableau de :
Théodore Gudin
(1802-1880)
Ils se sont rencontrés au détour d’un nuage :
Un pré-ado craintif au genou couronné
Et un véliplanchiste à peine plus âgé*,
L’un et l’autre tués par le vent fou de rage !
« Hé, salut ! dit l’adulte. Où crois-tu donc qu’on est ?
– Je pense qu’on est morts, dit l’enfant qui tremblait.
– Tu dois avoir raison ! Sacré foutu mistral !
Mais ce coup de tabac, c’était phénoménal :
De ma vie, je te jure, un pareil tape-cul,
Jamais, au grand jamais, j’en avais jamais vu !
– Je suis tombé à l’eau, fit l’enfant qui pleurait,
Là-bas à Porqueroll(es). Vous comprenez l’Anglais ?
– Pas mal, dit le sportif. Mais donne-moi la main :
Après un coup pareil on va être copains
Et on va s’entr’aider ; n’aie pas peur, je suis là…
A deux, c’est plus facile. Alors ne t’en fais pas… »
Le petit a noué ses bras immatériels
Autour du cou robuste et si providentiel
De son nouvel ami. La mort était moins dure
Avec ce compagnon à l’aimable figure
Qui lui dit : « Eh, t’as vu ! Je crois qu’il faut yaller
Car quelqu’un nous attend… comme un bonhomme ailé !
On est donc vraiment morts ? C’est relou à entendre,
Mais vaut peut-être pas le faire trop attendre… »
C’est donc un peu inquiets qu’ils ont rejoint leur ange,
Soudés bien malgré eux par l’aventure étrange
Qui les avait unis pour leur éternité.
Et la main dans la main ils se sont envolés…
*Ils ont disparu tous les deux dans la tempête du 28 octobre 2012