Carole a hérité du mas des Pierrefond,
Domaine familial depuis plus de cent ans.
Pendant qu’elle était seule, alors que ses enfants
Etaient tous à l’école, elle a trouvé au fond
D’un grenier isolé une très vieille malle
Où gisaient bien rangés des habits d’Amélie,
Son arrière grand’mère : un très long manteau gris
De laine un peu bourrue ; quelques jupons de toile ;
Une jupe en velours et la veste assortie
Où elle a découvert par hasard un secret :
Cousu dans la doublure, un pochon bien caché
Où dormait une lettre aux innombrables plis,
Lue des milliers de fois, sans doute, au fil du temps !
Une lettre d’amour écrite par un homme
Qui n’avait rien à voir avec Jules Prudhomme,
Son arrière grand-pèr(e) ! La lettre d’un amant :
Un certain Sébastien, du mas des Hautefort !
Follement amoureux d’une jeune Amélie,
Aussi folle que belle, et trompant son mari
Sans la moindre vergogne et sans aucun remords.
Carole est restée coite, émue par sa trouvaille.
La grand’mère Amélie ! Oh boudiou, quelle histoire !
Celle dont on vantait l’austérité notoire,
Et toujours attifée comme un épouvantail !
L’aïeule a remonté d’un cran dans son esprit !
Carole a donc remis la lettre bien au chaud
Dans son petit pochon au coeur du paletot.
Et là-haut, dans son ciel, Amélie a souri…