Chez ma grand’soeur Mireille il y a une chambre
Où c’est toujours l’été. Elle y a recréé
Un monde merveilleux où l’on est en juillet
Qu’on soit en février, au mitan de décembre.
A-t-elle dérobé un morceau de soleil ?
Tout y est lumineux comme sur une plage
De la côte à Marseille ! Sur un mur un mirage :
La Méditerranée, qui sonne le réveil
De milliers de gabians lorsque le faux soleil
Rallume ses rayons, danse en tourbillonnant.
Une incroyable image, un spectacle étonnant
Dont chacun s’esbaudit quand il va chez Mireille.
Bien sûr, la mer est fausse, ainsi que les oiseaux !
Faux aussi le jardin où fausses sont les fleurs
Poussant sur le plancher transformé par ma sœur
En tapis verdoyant où serpente un réseau
De ruisselets chantants. Et quant au plafond bleu,
C’est un drap outremer où flottent des nuages
De coton rose et blanc. Merveilleux paysage
Dans une simple chambre, et rêve fabuleux
Qui ravit nos amis; quand ils viennent la voir,
Qu’elle leur offre un verre en plein cœur de l’été
Même si c’est l’hiver, ils sont tout requinqués,
Prêts à ré-affronter l’air frisquet et le noir.
Il faut que maintenant j’avoue notre secret :
Ma sœur est une fée, et son séjour sur terre
Est pour notre famille un énorme mystère !
Mais elle y fait le bien. Qui parmi nous irait
Y trouver à redire ? On oublie dans sa chambre
La froideur et l’horreur des affres de décembre.