Poème illustré par un tableau de :
Claude Gellée, dit « Le Lorrain »
(1600-1682)
Il fait si chaud ce soir que Marseille immobile,
Prostré au bord de l’eau, ne bouge plus du tout.
Le ciel est accablant au-dessus de la ville
Inerte et léthargique : un colossal matou
Endormi sans bouger, plongé dans l’hébétude
D’un été enfiévré sans un souffle de vent !
La cité massaliote a pourtant l’habitude
De ces longs jours brûlants… Mais le temps si mouvant
N’est plus ce qu’il était, réserve des surprises !
L’horizon rougeoyant est bigarré de feu,
Rayuré des longs rais mordorés et cerise
D’un lourd soleil qui fond sur les flots peints en bleu.
C’est beau… mais l’on a chaud ! La ville est engourdie
Sous un ciel embrasé zébré de tous les roux
Qui peuvent exister. Et chacun psalmodie
Tout au fond de son cœur l’hymne secret et fou
Adressé en secret au Génie de la pluie :
Oh, puisse-t-il pleuvoir ! Une bouffée d’air frais,
Un tout petit nimbus qui macule la suie
De la nuit-canicule ! Oui, c’est vrai qu’il faudrait
Un gigantesque orage éradiquant enfin
L’infernale chaleur à grands coups de tonnerre !
On attend sans rien faire, on espère la fin
D’un été flamboyant trop extraordinaire…