Poème illustré par un tableau de :
Eric Bertrand
http://www.artquid.com/e.bertrand
Sous nos gros pataugas, la neige crisse et couine
En commençant à fondre. Et le pas lourd des gens
Y creuse peu à peu des sillons outrageant
La blancheur azurée de l’heure des matines.
Il fait très froid, la nuit : il gèle encor souvent ;
Mais dès que le jour point, il expose les pentes
A un flot de soleil irisé qui violente
La neige trop fragile emportée par le vent.
En-bas, elle est très lourde, et mars qui la transforme
En un gras margouillis la dissout peu à peu.
Il fait doux aujourd’hui. De la grisaille pleut.
Sous le ciel barbouillé la montagne est difforme.
Seuls les très hauts sommets sont encor éclatants
Quand y giclent tout droit de longs traits de lumière
Les repeignant d’argent. Et il sourd de la terre
Une sorte d’appel réclamant le beau temps…
Où est passée la neige ? Avant de disparaître,
Elle formait au sol un très épais tapis :
Qu’en est-il advenu ? Est-ce le Temps tapi
Au fond de l’Univers qui vient de s’en repaître ?
Car la neige a fondu, et nos nuits sont moins belles
Sans ce feutre bleui par le joli croissant
De la lune d’hiver. Quelques flocons dansant
S’essaient parfois le soir à jouer les rebelles…