Poème illustré par un tableau de :
Yves Lallemand
La Beauté, infinie, vient d’éclore là-haut,
Dans un val de l’Ubaye. On en reste immobile,
Respiration coupée, paroles inutiles,
Et tellement ému qu’on sent son cœur qui faut*.
L’on voudrait que le temps enfin s’immobilise,
Que l’image inouïe ne bouge plus du tout
Et s’éternise ainsi, véritable avant-goût
D’un paradis parfait que l’hiver cristallise,
Mais où l’on n’a pas froid ; dont les seules couleurs
Sont des accords de gris sculptés par la lumière
Qui pleut d’un soleil roux… Les nues sont incendiaires
Au-dessus du sol lisse à la molle rondeur ;
La neige lustrée luit, soyeuse et boursouflée,
Et des mélèzes noirs y sont plantés tout droit
Comme pour contrarier de leur profil étroit
La blanche obliquité des pentes bosselées.
Paysage parfait, si doux et si violent
Et beauté infinie d’un hiver en Ubaye…
Mais le tohu-bohu d’un choucas qui criaille
Nous ramène ici-bas, le coeur un peu dolent !
*Le coeur défaille