Le vieux chien des Durand trotte tout essoufflé
Entre Rognes et Lambesc. Il a quitté la ferme
Où il a vu le jour, et vient de mettre un terme
A une vie pourrie. Tout effroi ravalé,
Il s’est enfin enfui ! Il s’est carapaté,
Tout de bon cette fois! Car si la pauvre bête
A tenté moultes fois la poudre d’escampette
Loin du vieux mas honni, ses essais ont raté
Et il s’est fait choper… Mais là, Thor est content,
D’autant plus qu’il a pris, l’emportant dans sa gueule,
Le gros trousseau des clés. Le père Durand gueule :
Il ne peut plus rentrer et sa télé l’attend !
Ce qu’il ignore encor, c’est que cette fois-ci,
Le vieux chien est certain de sa bonne fortune :
Profitant de la nuit, il marche au clair de lune,
Enivré de bonheur car il a réussi
A fuir loin de son joug, de ces affreux humains
Qui depuis des années le molestent en douce,
Protégés des « on-dit » au fond de leur cambrousse !
Il a su prendre enfin un tout autre chemin…
Il a chipé les clés – larcin enquiquinant !
Puis il s’est ensauvé avec la panse pleine
Du gros rôti bien gras que la grand’mère Irène
Tenait prêt pour le four. Et il va trottinant
Le long de la chaussée et vers la liberté !
Il a mis les Durand proprement à la porte
De leur propre maison ! Le Diable les emporte…
Les clés entre les dents, le briard enchanté
Est tout fier de son coup… Las ! Ce sot n’entend pas
Le grand coup de klaxon d’une grosse voiture
Qui l’écrabouille net. Finie, son aventure ?
Non ! L’âme du vieux chien, balancé comme un tas
Dans le fond d’un fossé, va juste s’envoler
Au Paradis canin, là où la mort est belle :
Os à moelle à foison, chiennes en ribambelles !
Et planqué sous son corps, le gros trousseau des clés…
Lu sur Facebook :
Robin Wood : Ah, que j’aime ces poèmes qui « ressemblent à la vie » ! Une fois de plus c’est tellement vrai… le sort de bien des chiens est lié à la bonne (ou mauvaise) volonté des maîtres. Et pourtant, chez ces animaux on ne peut trouver qu’amour et fidélité. Leur seul désir : être notre meilleur ami ; et quand on a besoin d’une main tendue on trouve toujours…. sa patte. Une jolie leçon contenue dans ce poème ! Et comme toujours : j’adoooore !!!
Merci, Robin !
J’étais si heureux de lire les sept premières strophes et j’en ressentais même la douceur et la joie de la liberté… quel dommage cette fin. Merci pour cette belle lecture. Amitiés
Ce n’est pas triste : il est vengé, au Paradis des chiens !