Poème illustré par un tableau de :
Claude Monet
(1840-1926)
La Méditerranée n’en peut plus de subir
Les tourbillons du vent s’acharnant à fouir
Sa surface d’étain. Tout hérissées d’écume,
Ses eaux bouleversées s’insurgent sous la lune,
Criblées par des grêlons tels des billes d’acier
Qui mitraillent ses flots distordus, disloqués
Par le mistral roulant en rafales démentes.
La nuit est claire et bleue, et des vagues géantes
S’abattent sur les quais cirés par le verglas.
Hululant comme un loup, le vent sonne le glas
Du beau temps automnal pour imposer l’hiver :
En rudoyant ainsi et la terre et la mer,
Il veut leur rappeler qu’au pays de Provence
C’est lui le souverain, dont la toute-puissance
Règne quand il le veut, comme il veut, et partout ;
Qu’il peut, quand il l’entend, agir tout comme un fou !
Mais la mer révoltée d’être ainsi malmenée
Lance vers le ciel noir sa clameur outragée ;
Se tordant sous les coups comme une hydre en colère,
Elle gonfle ses eaux et se rue vers la terre
Pour mieux cracher sa rage. Elle éructe en grondant,
Envoyant sur les quais d’énormes paquets blancs
Qui caillent aussitôt tant le sol est gelé.
Là-haut la lune est ronde et son halo glacé.