Poème illustré par un tableau de :
Eric Bruni
http://www.liensutiles.org/ebruni.htm
Tout autant qu’au mitan du flamboyant juillet
Sec comme un désert blanc. Jean est pourtant gêné :
Il manque quelque chose, il y a un défaut
Dans le déroulement idéal des beaux jours…
Puis soudain il comprend : la dernière cigale
S’est tue depuis hier ! Plus de chant estival…
Il en ressent alors comme un chagrin d’amour,
Une peine infinie qui lui vrille le coeur ;
Un sentiment de perte et même d’abandon
Qui le laisse meurtri, enlisé tout au fond
D’un morne désespoir. Une énorme douleur…
Car Jean est vraiment vieux, usé et très malade ;
Rien ne dit qu’il vivra encor un autre été
Fleuri de jours joyeux et tout ensoleillés
Que les gentils cricris égaient de leur ballade.
Il s’en veut maintenant de les avoir zappés,
Voudrait rembobiner le temps pour ré-entendre
Leur crincrin lancinant, agaçant… et si tendre
Puisqu’il est son symbole affectif de l’été.
Peut-être se peut-il qu’il les ait entendus,
Mais sans les écouter ? Lors des trois derniers mois,
Les cigales vassales du grand soleil-roi
Se sont évertuées à chanter, éperdues,
Mais il n’a pas songé que peut-être pour lui
C’était un chant ultime. Il se sent mutilé
D’un facteur essentiel. La Provence se tait,
Et sa tranquillité résonne comme un cri.
Mélancolie estivale !