Poème illustré par un tableau de :
Franck Carron
De ses doigts le Printemps amignonne les fleurs
Pour qu’elles s’ouvrent mieux dans la lumière neuve ;
Puis il les colorie de la seule couleur
Qui sied à leur beauté, après la rude épreuve
De ce maudit Hiver qui les a épuisées.
Il a repeint le ciel à grands coups de pinceau
Dégoulinant de bleu. La campagne grisée
Se laisse caresser par ses tendres assauts,
Buvant avidement les rayons du soleil
Qui chauffe le sol noir de ses flammes fourchues.
L’eau du puits étincelle, et un halo vermeil
Couronne l’olivier aux ramures crochues.
Le chat dort sur le dos. Il n’a même pas vu
Le tout petit oiseau ramassant des brindilles
Pour son nid frais bâti, qui doit être pourvu
De mousse bien douillette et de fraîches ramilles !
Le Printemps affairé qui voudrait bien l’aider
N’en a pas trop le temps : il a bien trop à faire :
Décourager le vent qui s’est mis à rôder
Et dont le souffle froid peut refroidir la terre ;
Faire monter la sève au coeur des arbres nus,
Effleurer les bourgeons pour qu’ils s’ouvrent plus vite,
Installer pour longtemps le beau temps revenu,
Ne surtout point bâcler sa tâche à la va-vite…
C’est pas mal de boulot, mais ensuite il aura
Neuf longs mois délicieux pour vivre sa paresse.
Tout doit donc être au point. Il sait qu’il ne peut pas
Commettre comme un sot la moindre maladresse…