Elle est noire, elle est rouge. Elle est cristallisée
Dans les tréfonds de l’âme en tout petits cailloux
Aux faces hérissées de pointes aiguisées ;
En dards empoisonnés dont le venin rend fou ;
En gravillons rugueux, un ballast dont le poids
Entrave le tempo du coeur blessé qui lutte
Pour maîtriser son pouls… Puis elle se déploie,
Entraînant tout le corps dans une atroce chute
Dont il sort estropié. Car elle est meurtrière,
Capable de tuer. Son pouvoir est dément
Et pourrait embraser la terre toute entière,
En en éliminant le mot même d’amants.
Acide destructeur, sentiment corrosif
Et dont on peut crever : terrible est la géhenne* !
Comment peut-on subir un chagrin aussi vif ?
Comment peut-on haïr beaucoup plus que l’on aime ?
Vous laissant tout à nu, mutilé par la peine,
C’est un trouble insensé et qui ravage tout.
Qu’y a-t-il donc de pis sur Terre que la haine
Qui annihile l’âme en y forant ses trous ?
* Géhenne : au Moyen-Age, la torture