Pas bien loin du Jarret vit un très vieux bonhomme
Qu’on appelle Marius : il ressemble à Fresnay,
Un acteur d’autrefois – bien oublié en somme !
Il parle bien souvent du temps où le quartier
Etait une campagne avec une rivière
Claire comme le ciel qui venait s’y mirer.
Et il galège à peine ! Pétillant de lumière
Et longeant des prés verts roucoulait le Jarret
Qu’un jour on a couvert. Depuis il est aveugle
Et va en tâtonnant sous de grands boulevards
Où grouillent des vélos, des voitures qui beuglent,
Des taxis, des cinglés, des gens et des motards…
Mais bien que souterrain, enserré dans la pierre,
Le Jarret continue à couler droit devant
Jusqu’à la belle Huveaune, oubliant ses misères,
Roulant un peu plus fort pour rejoindre le vent.
Et Marius dit qu’un jour il se révoltera,
Qu’un orage insensé viendra le délivrer
De son corset de pierre et qu’il explosera
Pour retrouver l’air pur dont l’Homme l’a privé.