Poème illustré par un tableau de :
Ivan Aïvakovski
(1817-1900)
On était en hiver et il faisait très froid ;
Mais l’on se sentait bien, lové dans sa maison
Bien chaude et bien douillette, éclairée à foison
De la cave au grenier… quand, le coeur en émoi,
On fut tous submergés d’un seul coup par la nuit !
La Ligne avait sauté et toute la Provence
Se retrouvait soudain – énorme extravagance !
Sans électricité, base de notre vie !
Tout d’abord un grand cri ! Puis en grognant pas mal
Et en se bousculant on chercha des bougies :
Pas facile à trouver ! Mais bien petit ennui
Auprès de l’essentiel : branle-bas général
Dans toute la région quand on se rendit compte
Qu’on resterait des jours sans pouvoir réparer !
Nous nous sentions soudain, sans notre bonne fée,
Aussi déshérités que les Vilains des contes.
Depuis lors on a froid et l’on est démuni
De tout ce qui faisait notre unique bien-être ;
Comme des enfants nus et qui viennent de naître,
Attendant que revienne l’électricité,
Nous avons l’impression qu’on a pris notre vie :
Congélateurs, ordis et machines en panne…
Plus rien ne sert à rien ! La Nature ricane
Qui nous voit peu à peu sombrer dans la folie !
Nous comprenons enfin notre asservissement
Car plus rien ne fonctionne et plus rien n’est pareil !
Et tout notre Midi plongé dans le sommeil
Vit depuis près d’un mois un drame hallucinant…