Le Printemps, bon garçon, bade dans les rues grises
De Carry fatigué par un trop long hiver.
C’est le petit matin, il fait beau, et la mer
Chuinte tout doucement comme chante la brise.
Le soleil est bien sage, et il flotte partout
Une tendre douceur, une douce mollesse.
Mais le Printemps hésite à relâcher la laisse
Qui bride encor les fleurs en leur serrant le cou,
Comme ces mimosas épineux qu’il musèle,
Déjouant leur désir forcené d’exploser
En glomérules d’or sous leur jolis plumets :
Il est encor trop tôt ; certains matins il gèle !
Les fleurs ont des bourgeons au ventre tout gonflé
Du suc générateur d’une vie impatiente.
Mais la Nature lasse est encor trop dolente
Pour qu’on la brusque ainsi. Ne point trop s’affoler,
Laisser du temps au temps ! Saison trop incertaine,
Le Printemps n’est pas sûr, et l’hiver dépité
Peut bien s’être embusqué pour venir tout gâcher.
Il est encor trop tôt pour songer aux fredaines…