Poème illustré par un tableau de :
Charles Camoin
(1879-1965)
Le temps est merveilleux : pas un seul souffle d’air !
Marseille en est tout bleu et infiniment calme.
Son ciel est indigo, presque mauve, et les palmes
Du phoenix* au jardin déploient leur plumeau vert
En bouquet immobile. Il n’y a pas de vent,
L’on devrait être heureux, et ce temps idyllique
Sans brise et sans risée nous laisser euphoriques :
Une journée de rêve ! Et pourtant, et pourtant…
Comment donc oublier ce phénomène honni
Que nous redoutons tous ? Car cet air bien trop stable
Nous apporte aussitôt en fléau exécrable
Son plein de pollution ! Tout autant qu’à Paris…
C’est vrai qu’avec la mer, Marseille l’insouciant
Peut se croire à l’abri : sa Méditerranée
Devrait débarrasser cette belle journée
Inondée de soleil des miasmes le viciant !
Mais ce raisonnement est un brin trop succinct !
Marseille est pollué tout autant que les villes
D’au-delà de Valence. Et s’il semble tranquille,
Il est pris dans les rets d’un traquenard malsain
De fumées et de gaz, de mille impuretés ;
Malgré la mer voisine, une infection le mine,
Et son ciel de cobalt fait parfois grise mine
Tant l’encrasse à huis-clos l’immonde saleté
D’atomes dégoûtants qu’on ne voit pas du tout.
Il fait beau aujourd’hui, la ville est lumineuse,
Mais une pollution sournoise et pernicieuse
Tel un mal écoeurant se diffuse partout.
* C’est un palmier très courant