Arnaud s’en va bientôt devoir aller dormir,
Retirer pour toujours l’incroyable costume
Qu’on appelle la Vie, cousu de souvenirs,
D’anecdotes, de joie, de peine et d’amertume.
Un bien curieux habit, fait de mille morceaux
Maintenant très usés – unis, multicolores –
Dont Arnaud est lassé car il n’est plus très beau.
Peut-être pourrait-il s’en travestir encore,
Mais il a tout vécu. Il est vraiment trop las
Pour y surajouter des pièces bien plus neuves.
Recoudre le costume ? Il n’existe ici-bas
Pas un seul procédé ni une seule épreuve
Qui puissent réparer les multiples erreurs
Faites en assemblant ces pièces disparates.
L’on ne revient jamais sur l’heur et le malheur
Qui composent la vie des pauvres automates
Que nous sommes toujours, vêtus de cet habit.
Et même s’il est fait des pièces innombrables
D’un costume arlequin, ce vêtement nous suit,
Collé à notre peau par un Sort intraitable…
La vie d’Arnaud ressemble à ce frac d’Arlequin
Fait de bouts de tissu, colorés ou très sombres ;
Et il est naturel que le Destin taquin
Les ait parfois cousus en les surfilant d’ombre…