Le bourgeon opiniâtre

D’une graine a jailli un petit museau vert,
Pointe verte et bien drue toute gonflée de vie
Mais qui, las ! se trompait. Car son temps de survie
Serait vraiment très bref : on était en hiver,

Et l’automne flétri avait sonné le glas
De ses tout derniers jours. Encore quelques feuilles
Sur des rameaux noircis ; un temps gris où l’on cueille
Avec joie le soleil cliquant par ci, par là…

Quand il daigne apparaître : à peine quelques rais,
Les ultimes sursauts d’une terne lumière !
Mais le bourgeon jugeait que ce qu’il fallait faire,
C’était rester en vie. Trop jeune, il ignorait

Qu’il est un temps pour tout, et qu’il faut que l’hiver
Détruise toute vie afin que tout renaisse.
Le mistral eut donc beau le tourmenter sans cesse,
Comme le froid, la pluie, le petit surgeon vert

S’accrocha fermement, solide et obstiné,
Produisit une feuille, et puis une autre encore,
En ouvrant au soleil atone tous ses pores.
Tout était contre lui, mais il voulait gagner,

Même s’il ignorait qu’un jour il deviendrait
Un arbre magnifique malgré sa naissance
Niant toute logique et défiant la science.
Un tout petit rameau, curieux et guilleret,

Arrachant à la vie ses tout derniers sursauts
Pour les garder en lui, avec force et courage.
Un tout petit rameau se battant avec rage
Contre un destin fatal. ll avait eu tout faux

Dès les premiers instants de sa triste naissance,
Mais était devenu un géant en puissance…

A propos Vette de Fonclare

Professeur de lettres retraitée, a créé un site de poèmes dits "classiques", pratiquement tous voués à la Provence.
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