Les nacelles de la Chandeleur

A Bédarride*, antan, les jeunes du village
Savaient pertinemment que pour la Chandeleur
Ils devaient fabriquer, comme c’était l’usage,
De tout petits bateaux qu’ils façonnaient en choeur

Et lançaient dès le soir sur la Sorgue, au Vaucroze,
Après y avoir mis des bougies ; puis, fébriles,
Ils couraient vers le pont en aval et, tout chose,
Attendaient l’arrivée de l’esquif si fragile

Qui roulait, cahotait, tanguait, tourbillonnait…
Craignant par dessus tout que leur bougie n’expire,
Les jeunes, coeur battant, priaient et suppliaient
La minuscule flamme ; ils redoutaient le pire :

Son extinction brutale au fil bleu du courant !
Evénement cruel, un très mauvais présage
Pour l’année à venir ! Admonestant le vent,
Les algues, les rochers, ils trépignaient de rage

Et hurlaient pour booster leur barque de papier…
Quand elle était passée, certains étaient ravis :
Leur flamme vacillait, mais ils avaient gagné !
Les perdants grommelaient, maudissant leur bougie…

*Orthographié aussi Bédarrides

A propos Vette de Fonclare

Professeur de lettres retraitée, a créé un site de poèmes dits "classiques", pratiquement tous voués à la Provence.
Ce contenu a été publié dans Cités provençales, Contes, Hiver. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.