Poème illustré par un tableau de :
Pascal Giroud
Le vieux jas de la Vouivre était bien protégé
Par un ressaut rocheux, surplombant la falaise.
Félicien le berger s’y venait abriter
Dès que tombait la nuit. Il s’y sentait bien aise,
Son troupeau endormi rassemblé près de lui.
Mais un beau soir d’été, un fâcheux incident
Le retarda d’une heure : une de ses brebis
Tomba au fond d’un trou ! Un sérieux contretemps !
Il fallut la hisser, la sortir, constater
Qu’elle était saine et sauve et qu’elle pourrait suivre
Le reste du troupeau… Puis tout étant parfait,
On put continuer à monter vers la Vouivre.
On avait parcouru les trois-quarts du chemin
Quand un énorme bruit, tel un coup de tonnerre,
Eclata tout à coup. Le brave Félicien
Fut projeté au sol comme par un éclair
Et soudain submergé par un flot de poussière…
Tout d’abord assommé, il se précipita
Vers le jas… englouti sous des tonnes de terre
Et tout écrabouillé : un monceau de gravats !
La saillie-promontoire s’était détachée,
Effaçant d’un seul coup toute trace de vie
Au pied de la falaise. Et le berger sauvé
Serra tout contre lui son ange la brebis…
Il en fit son amie, jamais ne la vendit !
Et quand il s’endormait au milieu des pâtures,
Passait les nuits d’été lové et tout blotti
Contre la laine chaude et rêche de sa mie.